La question des droits des salariés au sein du couple interpelle… Peut-on, légalement et éthiquement, contraindre un couple travaillant au sein de la même entreprise à adopter des rythmes de travail divergents et à opérer dans des services distincts ? Cette pratique, potentiellement perçue comme une atteinte à l’équilibre familial de l’avis Legimedia, soulève une autre question légale, à savoir celle de la discrimination basée sur la situation familiale !

Code du travail et discrimination familiale

« Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de nomination ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte (…) en raison de sa situation de famille ». C’est en ces termes que le Code du travail traite le principe de non-discrimination dans le cas des familles. Par conséquent, il est interdit de discriminer en fondant sa décision sur la situation familiale des salariés.

Est-il possible d’imposer des rythmes de travail différents à un couple de salariés ?

Prenons un cas concret pour répondre à cette question : celui d’un couple travaillant dans le même magasin de bricolage. Sa particularité ? L’employeur n’était pas au courant des relations que Monsieur A, au moment de son embauche, entretenait avec Monsieur B. Mais voilà que Monsieur A contracte le Covid-19, et transmet alors une liste de contacts à l’employeur, dans laquelle on retrouve Monsieur B, son compagnon. Dès lors, l’attitude de sa hiérarchie a changé…

C’est alors que les plannings du couple ont été modifié à leur reprise, de telle manière qu’ils n’avaient plus de jour de repos en commun. Sans surprise, le couple décide de saisir le Défenseur des droits qui, à son tour, a lancé une enquête visant l’employeur pour avoir des explications sur les faits de discrimination dont il est accusé. En réponse, l’employeur n’a pas nié avoir pris en considération la situation familiale du couple de salariés. A la place, il évoque l’usage selon lequel il ne fait pas travailler au service client des salariés en couple, ou ayant un lien de parenté.

Suite à cela, le Défenseur des droits a donc émis des recommandations à l’adresse de l’employeur. Dans le détail, il lui intime de prendre contact avec les réclamants pour réparer leur préjudice, et de modifier ses pratiques liées à la planification des horaires de travail, de sorte à respecter le principe de non-discrimination. Le Défenseur des droits a également recommandé de faire un travail de sensibilisation des responsables de l’entreprise à la non-discrimination, et a donné à l’employeur un délai de 3 mois pour rendre compte des suites données à cette recommandation.

L’employeur persiste et signe

Ayant décidé de ne pas donner suite aux recommandations du Défenseur des droits, l’entreprise en question a expliqué dans un courrier : « loin d’être une mesure discriminatoire, le fait d’éviter de ne pas planifier simultanément deux collaborateurs entretenant une relation sur le même poste s’inscrit dans une démarche à deux niveaux : une gestion humaine des effectifs afin de préserver de bonnes relations entre chaque collaborateur, un acte managérial de bon sens afin de prévenir tout conflit d’intérêt ».

En réponse, le Défenseur des droits a conclu que le couple de salariés a subi une discrimination en raison de sa situation familiale, notamment car son employeur n’a pas prouvé que les décisions prises étaient justifiées de manière objective et licite.